Le mince espoir d’une saine concurrence sur la fibre optique belge
Ce vendredi, les régulateurs (fédéral et régionaux) ont exprimé le souhait de consulter les opérateurs pour décider d’un prochain cadre législatif plus favorable aux acteurs alternatifs. Orange le souhaite ardemment. Les autres non.
Le communiqué de l’IBPT diffusé hier aux rédactions belges est éclairant sur le bilan de l’organisme : « A la suite d’une analyse approfondie, les différents régulateurs sont arrivés à la conclusion que les marchés de détail de l’Internet haut débit et de la radiodiffusion télévisuelle demeurent caractérisés par des déficiences concurrentielles ». Autrement dit, les actions entreprises par les régulateurs ces 20 dernières années n’ont toujours pas permis d’installer un marché sain et compétitif en Belgique. Ceux qui ont tenté de briser le duopole Proximus-Voo/Telenet se sont tous cassé les dents. Ou ont été rachetés par un membre du duo.
En cause : les prix d’accès au cuivre et, plus récemment, au câble coaxial restent nettement trop chers pour permettre aux nouveaux entrants de dégager des marges suffisantes pour progresser. Voire pour ne pas perdre de l’argent chaque mois. Concrètement, ces tarifs, régulés, sont calculés sur les offres de gros aux entreprises dont on retire un léger pourcentage. Dans ce cadre, entrer en concurrence avec Proximus et Voo, c’est comme prendre la mer en pleine tempête.
Du coup, l’IBPT et ses comparses souhaitent introduire le mode de calcul basé sur les coûts réels de l’infrastructure. Comme en France où, c’est peu de le dire, la bataille est nettement plus engagée.
Proximus et le câble font de la résistance
Mais, pour y parvenir, le régulateur doit d’abord procéder à une consultation de tous les opérateurs. Elle aura lieu jusqu’au 15 septembre. Tout le monde y répondra, c’est certain. Les alternatifs pour dire à quel point il est temps de bousculer le marché. Les historiques, Proximus et les câblos, pour vivement contester afin de ne pas mettre en danger leurs investissements.
Auparavant, ce type ce consultation a toujours débouché sur de très timides décisions. Au mieux, l’IBPT est parvenue à ouvrir le câble. Ce qui semble tout de même la moindre des choses sur un marché compétitif. Mais ce sont Voo et Telenet qui ont finalement décidé du prix. Autant dire que la porte a été quelque peu refermée.
Sauf que, cette fois, il y a Orange. Un géant qui n’a plus l’intention de se laisser faire et qui a sauté sur l’occasion pour répéter à nouveau ses doléances. Les arguments y sont : Proximus et les câblos tiennent 99% du marché. Orange a investit 60 millions d’euros et créé 200 emplois, directs et indirects malgré ce climat hostile. De l’autre côté, Proximus soulignera les dividendes qu’elle dépose annuellement à un gouvernement qui accueille cette bourse miracle à bras ouverts. Les intercommunales, elles, versent leurs bénéfices aux communes. Bref, le lien entre les régulateurs et les opérateurs historiques reste particulièrement solide.
La fibre en ligne de mire
Mais, Orange a tiré une autre flèche antérieurement en proposant à Proximus un co-investissement dans la fibre. La réponse a été cordialement négative. L’initiative n’en reste pas moins astucieuse car elle place les régulateurs devant un dilemme : autoriser une saine concurrence pour diminuer les prix et contenter le citoyen ou maintenir le duopole pour bénéficier des rentrées conséquentes vers les caisses de l’Etat et des Régions.
Orange a montré ses atouts, son envie et ses capacités financières. Celles qui lui permettent de perdre de l’argent sur chaque client pour mettre la pression sur les autorités. L’IBPT et ses administrateurs seront donc quelque peu coincés entre le lobbying public et les intérêts du privé.
L’espoir d’une saine concurrence sur la fibre reste toutefois mince car la consultation que nous évoquions plus haut concerne également les moyens d’accès à la fibre. Là, c’est Proximus qui devra démontrer si l’ouverture est techniquement faisable et si oui, dans quelles conditions. Nul doute que Proximus déploiera toute son énergie pour orienter le marché vers la solution qui lui sied le mieux. Celle qui lui fera le moins d’ombre.