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Guido Verbeke est un patron avenant et cordial : sérieux déridé, apparence bonhomme, verbe précis et concis. A la tête de la filiale belge de Dangaard Telecom, le principal distributeur belge de téléphones mobiles auprès des points de vente, il compte à Bruxelles rien moins que 36 salariés. Rencontre inédite avec un analyste du marché « à la source ».

Première étonannante constatation : il n’y aurait pas de différence entre le Nord et le Sud du pays en termes de profil de marché. « Ce qui fait varier les choses, c’est la subvention des terminaux par les opérateurs, notamment en France et les Pays Bas. Cela dit, la Belgique me semble un marché plus sain, tout comme le Portugal. Pourquoi ? L’utilisateur paie le prix plein et le coût est finalement moins élevé qu’ailleurs. » Autre conséquence : le taux de pénétration belge reste inférieur au reste de l’Union, où l’on enregistre parfois 120 à 140 % (plus d’un terminal par utilisateur).

Minimisant l’effet de l’importation sur les technophiles – « Le phénomène s’est estompé » -, il assure que le marché belge n’est pas encore saturé, loin s’en faut, arguant également que la vente des accessoires (dont les cartes mémoire) est en plein essor.

« Le tarif des communications reste lui aussi trop élevé. La réglementation sur le roaming imposée par l’Union européene est une première réponse positive, mais cela doit encore évoluer. » Parmi ces tarifs élevés, citons l’Internet mobile. « Je ne vois pas d’avenir immédiat pour les applications rêvées par les opérateurs (Ndlr : visiophonie, télévision mobile). La 3G restera longtemps encore un produit de connectivité destiné au marché business. La demande a été surestimée. »

La convergence est en marche, il l’assure : « Regardez le N95, terminal assez fantastique. Son seul problème : l’autonomie. Il faut que les constructeurs travaillent aujourd’hui sur ce point crucial pour la suite. A mon avis, au-dessous de 5 Mpx, l’avenir est aux photophones. Au-delà, l’utilisateur achètera un appareil séparé. La convergence et la miniaturisation ont aujourd’hui encore leurs limites. Je peux toutefois parler d’un exemple très précis, celui de la montre. Des enquêtes nous prouvent qu’aujourd’hui, l’utilisateur a tendance à ne plus porter de montre, puisque l’heure se retrouve sur son mobile. »

Dangaard Telecom travaille avec la plupart des enseignes belges, dont The Phone House, la Fnac, Carrefour, Belcompany. « Chaque enseigne a sa spécificité. Si vous pensez aux terminaux pas cher, c’est Carrefour qui gagne. Pour les PDA, la Fnac reste une référence. On parle d’ailleurs de ‘client Fnac’ en parlant des technophiles. Il n’y a pas un leader incontestable, mais une variété de leaders sur des marchés séparés. »

Outre les points de vente, ce sont les opérateurs travaillent directement avec Dangaard en Belgique : « Nous travaillons par exemple avec One Mobile ou Euphony dans les offres de combinés. »

Enfin, la filiale belge du danois Dangaard s’est fixé d’autres objectifs depuis deux ans : une opération de séduction auprès des grands comptes et des PME. Principe : fournir non seulement les terminaux mais également une expertise de marché, passant notamment par la formation. C’est que les téléphones et PDA ne sont plus le seul domaine de compétence du groupe, qui évoque aujourd’hui l’extension de ses activités de consultance dans le domaine de la voix sur IP.

Sur les spécificités des constructeurs, Guido Verbeke explique que l’image de marque et la qualité font aujourd’hui de Nokia un leader inconstestable. SonyEricsson brille par ses fonctionnalités Walkman et photos. Samsung semble être devenue une marque fashion : « Vous savez, les personnes qui achètent un Samsung l’achètent pour le montrer. C’est un accessoire de mode. » Quant à HTC, l’entreprise touche essentiellement les cadres, voyageurs et profils « européens » (Commission, Conseil). HTC doit beaucoup à Dangaard : ils ont en effet contribué très longtemps à l’implantation du système Windows Mobile (durant l’ère « Qtek ») auprès du public au Benelux, notamment par l’ouverture du site smart-phones.be, offrant support et outils de configuration.

Plus discrète en Belgique, la marque Motorola provoque chez notre hôte un rictus. « Nous travaillons avec eux à leur demande sur une amélioration de l’attractivité de la marque auprès des consommateurs belges. Vous savez, Motorola figurait parmi les leaders du marché au tout début des années 90. Vers la fin des années 90, l’entreprise a sous-estimé la capacité de Nokia à bousculer le marché. Voilà où nous en sommes aujourd’hui, mais cela est appelé à changer. Nous nous y attelons. »

Son sujet de prédilection ? Les smartphones. « Oui, l’iPhone a changé la donne. Oui, cela va ‘booster’ le marché, notamment par une remise en cause de la convivialité et par l’introduction d’une faicilité d’emploi jusqu’ici inégalée. Reste la question du clavier : indispensable pour certains. » Il montre le HTC Touch présenté cette semaine en Belgique et dont la commercialisation a commencé ce jeudi. « Un appareil compact, léger, plus simple à utiliser. J’ai mis 5 minutes à maîtriser la technologie Touch Flo (Ndlr : défilement et navigation au doigt sur l’écran). La synchronisation – SMS compris – est un élément très important et cet appareil, qui peut se piloter pour la plupart des fonctions à une seule main, est pour moi une grande avancée. »

« Je suis obligé de tester tous les appareils que je reçois et commercialise. » Mais est-ce un déplaisir ? Il sourit. D’où notre interrogation : quel est l’appareil que vous utilisez en ce moment ? « La semaine, un smartphone. Pour l’instant le Touch de HTC. Le week-end, c’est différent. J’en profite pour tester d’autres appareils : SonyEricsson, Samsung, Nokia. J’adopte alors un profil plus ‘loisir’. »

Cedric Godart